Au milieu des années 1970, à l’heure où les spécialistes prédisaient la mort prochaine de la musique première de l’Amérique noire, Magic Slim faisait déjà partie de ces derniers des Mohicans qui refusaient de trahir leurs racines sudistes en renonçant à la musique urbaine, brut de décoffrage, qu’il portaient en eux.
Né à Torrence, Mississippi, en 1937, Magic Slim confectionne très jeune sa première guitare à partir d’un balai et d’une caisse de bois. Son instrument préféré est pourtant le piano ; mais il l’abandonne quand il perd le petit doigt de la main droite en travaillant dans les plantations de coton.
A l’âge de 11 ans il rencontre Magic Sam qui devient son ami et l’incite à développer son propre style. Il fera mieux qu’adopter le conseil, devenant le vibrato le plus acide de toute l’histoire du blues.
Dans un monde qui cède volontiers aux sirènes du paraître, Slim apporte la preuve d’un naturel absolu qu’il partage avec sa musique, à des années lumière de ce blues passe-partout devenu la norme depuis que la mondialisation en a fait une denrée commerciale.
Mieux que quiconque, il personnifie ces immigrants sudistes venus chercher dans le Nord un « avenir meilleur », apportant avec eux un trésor de notes bleues qu’ils mettent en scène sans artifice dans les bars du ghetto, chaque week-end, en sortant de l’usine.
Il ne joue pas le blues, il est le blues !
De son vrai nom, Morris Holt, le grand Magic Slim est décédé en février 2013 à Philadelphie, laissant un héritage musical à la hauteur de son nom de scène... magic !